Élodie Bermudez, l'âme d'une (com)battante
" Cest quelque chose dassez fou. De tellement fort... On se limagine des centaines de fois et au final, lorsque cela arrive, on ressent une joie immédiate puis un véritable bonheur qui vient avec le temps." Cest encore un large sourire aux lèvres quÉlodie Bermudez raconte comment elle a conquis son titre de championne du monde de savate boxe française.
La jeune Toulousaine vient en effet dêtre sacrée, le 8 octobre, dans la catégorie des -48 kg aux dépens de lItalienne Elisa Picollo. Un combat dans lequel elle aura inexorablement pris le dessus, après une entame survoltée de son adversaire, pour finalement lemporter à lunanimité des juges. Et ce dans un contexte pourtant défavorable.
"Elisa Picollo évoluait dans sa ville natale. Et je nai eu quun mois et demi pour me préparer", explique Élodie Bermudez. Un laps de temps des plus réduits, durant lequel il aura fallu mettre les bouchées doubles malgré des conditions loin dêtre idéales. "Lorsque la date du combat a été officialisée, nous étions encore à la fin de lété et les clubs de boxe navaient pas rouvert, précise Bruno Sammassimo, coentraîneur de la Toulousaine. Faute de partenaires dentraînement les deux premières semaines, nous avons travaillé le physique sur les bords de Garonne puis effectué quelques prises de gants sur la terrasse dun ami."
Âgée de 24 ans, Élodie Bermudez ferait presque oublier quelle a découvert la savate sur le tard. En 2005. Soit deux années avant de rafler son premier titre de championne de France. "Jai toujours fait beaucoup de sport : de lescalade, de la natation, du surf... Arrivée à Toulouse, jai voulu messayer à un sport de combat. Et il y avait un club de savate boxe française dans ma rue, le TCMS", raconte celle qui a ensuite rejoint lEnceinte Savate Toulouse, où elle a commencé à travailler avec Christophe Candeil et Bruno Sammassimo.
"Ce qui ma le plus impressionné chez elle, cest son explosivité", note ce dernier, admiratif du parcours de ce brin de fille de 1,53m qui a su percer dans le milieu pugilistique malgré un gabarit atypique. "Je navais jamais été aussi inquiet pour lun de mes tireurs que lors de son premier combat en élite. Mais dès la troisième reprise, je me faisais surtout du souci pour son adversaire, avoue-t-il. A lentraînement, je lai vue prendre des impacts quelle naurait jamais reçu face à des adversaires de sa catégorie. Et elle ne bronche pas."
Lascension fulgurante dÉlodie Bermudez, exceptionnelle à ce niveau, aurait pu lêtre encore davantage sans quelques mésaventures qui lont empêché de côtoyer le niveau international avant cette année. Mais cest aussi face à ladversité, et durant une période qui la vu perdre sa couronne nationale elle a terminé demi-finaliste en 2008 puis finaliste en 2009 , que la championne a su se forger un mental à tout épreuve. "Cest la nature même de la boxe de ne jamais abandonner."
Une motivation et un caractère dont elle avoue avoir également trouvé lessence en 2008, année passée à Hong-Kong dans le cadre de ses études et durant laquelle Bruno Sammassimo lavait rejointe. "Cest une superbe expérience en termes de maturité", poursuit cette Lorraine dorigine.
A son retour dAsie, Élodie Bermudez franchit encore un palier en sinitiant à la boxe anglaise au sein du Boxing Toulouse Bagatelle, sur les conseils de son entraîneur. "Cétait à la fois pour la remotiver, lui faire découvrir autre chose, et pour compenser le faible nombre de combats disputés durant son séjour chinois", explique-t-il. Une discipline dans laquelle la combattante se sent aussi très à laise au point datteindre les demi-finales du championnat de France en 2010. De quoi également parfaire ses qualités en savate, et ainsi "gagner en technique et en organisation". Pari payant puisque la Toulousaine reconquiert le titre de championne de France de boxe française en 2010, avant de le conserver en 2011. Un succès qui lui ouvre enfin la voie du championnat du monde, tout en faisant delle une référence de son sport. "Élodie est lune des plus expérimentées du circuit avec une trentaine de combats en élite, ce qui est assez rare chez les filles", précise Bruno Sammassimo. Des états de service qui ne sont pas sans inconvénients : "Aujourdhui, plus personne ne veut laffronter. Elle a vidé sa catégorie, poursuit son entraîneur. Il ny a plus que quatre combattantes inscrites pour les championnats de France en -48 kg car plusieurs tireuses ont préféré tenter leur chance dans la catégorie au-dessus. Elle a donc très peu de combats prévus cette année et on nous demande de largent pour la faire monter sur le ring lors de galas."
Pas de quoi déstabiliser cette hyperactive qui sest mise en quête dune quatrième couronne nationale afin de se qualifier pour les championnats dEurope en 2012. Sans négliger sa future carrière professionnelle : elle a obtenu son master en tourisme après un cursus à lESC Toulouse. "Si vous pouvez dire que je cherche un emploi... Dans le tourisme, la restauration, ou tout autre secteur dactivité", dit-elle en riant. Le message est passé. En revanche, pas besoin dintermédiaire pour prouver la "détermination indéfectible" dÉlodie Bermudez. La même dont elle fait preuve sur le ring. "Les gens croient que je suis méchante car mon visage se transforme lorsque je combats. Mais jarrive simplement à un niveau de concentration tel que rien ne peut matteindre", précise la championne qui refuse de voir son sacre mondial comme une finalité. "Le fil rouge de ma motivation, cest la performance, car elle peut toujours saméliorer." Une battante, on vous dit.