• crédit Thierry Pons
    crédit Thierry Pons

Élodie Bermudez, l'âme d'une (com)battante

Mis à jour le mardi 21 février 2017 par Toulouscope

" C’est quelque chose d’assez fou. De tellement fort... On se l’imagine des centaines de fois et au final, lorsque cela arrive, on ressent une joie immédiate puis un véritable bonheur qui vient avec le temps." C’est encore un large sourire aux lèvres qu’Élodie Bermudez raconte comment elle a conquis son titre de championne du monde de savate boxe française.

La jeune Toulousaine vient en effet d’être sacrée, le 8 octobre, dans la catégorie des -48 kg aux dépens de l’Italienne Elisa Picollo. Un combat dans lequel elle aura inexorablement pris le dessus, après une entame survoltée de son adversaire, pour finalement l’emporter à l’unanimité des juges. Et ce dans un contexte pourtant défavorable.

"Elisa Picollo évoluait dans sa ville natale. Et je n’ai eu qu’un mois et demi pour me préparer", explique Élodie Bermudez. Un laps de temps des plus réduits, durant lequel il aura fallu mettre les bouchées doubles malgré des conditions loin d’être idéales. "Lorsque la date du combat a été officialisée, nous étions encore à la fin de l’été et les clubs de boxe n’avaient pas rouvert, précise Bruno Sammassimo, coentraîneur de la Toulousaine. Faute de partenaires d’entraînement les deux premières semaines, nous avons travaillé le physique sur les bords de Garonne puis effectué quelques prises de gants sur la terrasse d’un ami."

Âgée de 24 ans, Élodie Bermudez ferait presque oublier qu’elle a découvert la savate sur le tard. En 2005. Soit deux années avant de rafler son premier titre de championne de France. "J’ai toujours fait beaucoup de sport : de l’escalade, de la natation, du surf... Arrivée à Toulouse, j’ai voulu m’essayer à un sport de combat. Et il y avait un club de savate boxe française dans ma rue, le TCMS", raconte celle qui a ensuite rejoint l’Enceinte Savate Toulouse, où elle a commencé à travailler avec Christophe Candeil et Bruno Sammassimo.

"Ce qui m’a le plus impressionné chez elle, c’est son explosivité", note ce dernier, admiratif du parcours de ce brin de fille de 1,53m qui a su percer dans le milieu pugilistique malgré un gabarit atypique. "Je n’avais jamais été aussi inquiet pour l’un de mes tireurs que lors de son premier combat en élite. Mais dès la troisième reprise, je me faisais surtout du souci pour son adversaire, avoue-t-il. A l’entraînement, je l’ai vue prendre des impacts qu’elle n’aurait jamais reçu face à des adversaires de sa catégorie. Et elle ne bronche pas."

L’ascension fulgurante d’Élodie Bermudez, exceptionnelle à ce niveau, aurait pu l’être encore davantage sans quelques mésaventures qui l’ont empêché de côtoyer le niveau international avant cette année. Mais c’est aussi face à l’adversité, et durant une période qui l’a vu perdre sa couronne nationale – elle a terminé demi-finaliste en 2008 puis finaliste en 2009 –, que la championne a su se forger un mental à tout épreuve. "C’est la nature même de la boxe de ne jamais abandonner."

Une motivation et un caractère dont elle avoue avoir également trouvé l’essence en 2008, année passée à Hong-Kong dans le cadre de ses études et durant laquelle Bruno Sammassimo l’avait rejointe. "C’est une superbe expérience en termes de maturité", poursuit cette Lorraine d’origine.

A son retour d’Asie, Élodie Bermudez franchit encore un palier en s’initiant à la boxe anglaise au sein du Boxing Toulouse Bagatelle, sur les conseils de son entraîneur. "C’était à la fois pour la remotiver, lui faire découvrir autre chose, et pour compenser le faible nombre de combats disputés durant son séjour chinois", explique-t-il. Une discipline dans laquelle la combattante se sent aussi très à l’aise au point d’atteindre les demi-finales du championnat de France en 2010. De quoi également parfaire ses qualités en savate, et ainsi "gagner en technique et en organisation". Pari payant puisque la Toulousaine reconquiert le titre de championne de France de boxe française en 2010, avant de le conserver en 2011. Un succès qui lui ouvre enfin la voie du championnat du monde, tout en faisant d’elle une référence de son sport. "Élodie est l’une des plus expérimentées du circuit avec une trentaine de combats en élite, ce qui est assez rare chez les filles", précise Bruno Sammassimo. Des états de service qui ne sont pas sans inconvénients : "Aujourd’hui, plus personne ne veut l’affronter. Elle a vidé sa catégorie, poursuit son entraîneur. Il n’y a plus que quatre combattantes inscrites pour les championnats de France en -48 kg car plusieurs tireuses ont préféré tenter leur chance dans la catégorie au-dessus. Elle a donc très peu de combats prévus cette année et on nous demande de l’argent pour la faire monter sur le ring lors de galas."

Pas de quoi déstabiliser cette hyperactive qui s’est mise en quête d’une quatrième couronne nationale afin de se qualifier pour les championnats d’Europe en 2012. Sans négliger sa future carrière professionnelle : elle a obtenu son master en tourisme après un cursus à l’ESC Toulouse. "Si vous pouvez dire que je cherche un emploi... Dans le tourisme, la restauration, ou tout autre secteur d’activité", dit-elle en riant. Le message est passé. En revanche, pas besoin d’intermédiaire pour prouver la "détermination indéfectible" d’Élodie Bermudez. La même dont elle fait preuve sur le ring. "Les gens croient que je suis méchante car mon visage se transforme lorsque je combats. Mais j’arrive simplement à un niveau de concentration tel que rien ne peut m’atteindre", précise la championne qui refuse de voir son sacre mondial comme une finalité. "Le fil rouge de ma motivation, c’est la performance, car elle peut toujours s’améliorer." Une battante, on vous dit.

redaction@depechemag.com

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